3 JOURS À RIO

mercredi 10 août 2016

Jobim et la Bossa Nova

J’avais dix-neuf ans et je venais d’obtenir un boulot de pianiste de restaurant au Stash Café, dans le Vieux-Montréal quand ma mère m’a offert un livre de partitions des chansons du compositeur brésilien Antonio Carlos Jobim. Bien sûr, je connaissais sa célèbre “Girl from Ipanema” mais je n’avais pas encore idée de l’univers qui allait s’offrir à moi en ouvrant ce cahier de musique.  “One note Samba”, “Corcovado”, “Desafinado”, “Chega de Saudade”, tant de classiques que j’ai pris un plaisir grandissant à apprendre au piano, puis à la voix. Puis, les disques de Joao Gilberto, Astrud Gilberto, Milton Nascimento, Elis Regina, Gilberto Gil, Nana Caymmi, Dori Caymmi, Seu Jorge, et plus tard, Marisa Monte…Tant d’artistes que j’ai écoutés en boucle parce qu’au-delà de l’intelligence de leurs progressions harmoniques, de la fluidité de leurs mélodies, de la poésie de leurs textes et la richesse de leurs rythmes, ils chantent d’abord et avant tout avec leur coeur.

J’ai pris quelques cours de portugais pour être en mesure de saisir l’essentiel des textes de leurs chansons, j’ai appris à jouer au piano « la bossa nova » que j’aime tant et j’en ai gardé des influences dans certaines de mes propres compositions.

Le Brésil vivait ainsi d’une certaine façon en moi depuis le début de ma vie d’adulte, mais je n’y étais jamais allée. Je cultivais ce rêve depuis une dizaine d’années déjà lorsque la semaine dernière, on m’a appelée pour m’inviter à chanter à Rio, lors du lancement officiel des ArtsGames, qui feront leur retour (il n’y en a pas eus depuis des décennies) à Montréal en 2018. Je ne me suis pas faite prier deux fois! En sortant de l’aéroport Antonio-Carlos-Jobim (vous vous rendez compte! L’Aéroport porte le nom de mon compositeur préféré!)  j’ai vite réalisé que ma fascination pour la musique de ce pays allait bientôt s’étendre à toutes ses autres facettes.

Les voyages-teasers…

Lorsque je pars en voyage dans le cadre de mon travail, à moins qu’il ne s’agisse d’une tournée, je passe habituellement entre 24 et 72 heures dans le pays qui m’accueille, même s’il se trouve à l’autre bout du monde. Il en fut ainsi pour le Vietnam, où je suis restée exactement 48h avant de rentrer à la maison (tout un aller-retour en avion!), Hong-Kong, où j’y ai passé trois jours, tout comme Tokyo, Muscat, à Oman, où je suis restée quatre jours, Lima pour trois jours, Buenos Aires pour deux jours, et maintenant Rio…

Même s’ils peuvent sembler frustrants, à l’image d’un “tease”, j’adore ces courts voyages car ils constituent à mes yeux un peu les hors-d’oeuvres d’un pays. Ils me laissent sur ma faim mais par le fait même, me donnent le goût d’y retourner pour l’explorer de fond en comble si un jour l’occasion se présente. De même, comme je m’y trouve dans le cadre du boulot, je me sens moins comme une touriste, je rencontre et je collabore avec des gens de l’endroit, du même domaine que moi, et cela constitue une belle expérience en soi.

C’est donc depuis le Media Center de Rio que j’écris ce texte, en pleine frénésie car dans la salle d’à côté se trouve une conférence de presse donnée par la championne de judo Rafaela Silva qui vient de remporter la première médaille d’or pour le Brésil. C’est quand même cool, non!?!

Au fil des années et des spectacles à l’étranger, j’ai donc appris à m’imbiber de l’esprit d’une ville en peu de temps en faisant bon usage de mes plages libres entre les répétitions et les rencontres qui sont prévues à mon agenda. Et c’est une merveilleuse façon de voyager.

La beauté de Rio

Selon moi, la meilleure manière de découvrir une ville est de marcher à travers celle-ci. J’aime aborder mes voyages de façon flexible, en ne planifiant pas trop, afin de laisser de la place à l’inspiration et à la spontanéité. Souvent, je modifie mes trajectoires en chemin, attirée par quelque chose que je n’avais pas prévu, un monument, une rue, un resto. Ainsi, ce matin, j’ai débuté ma journée en allant courir le long d’une piste cyclable qui avait pour fond d’écran le fameux “Pain de sucre” et qui était envahie par des athlètes (toute une motivation si l’on se trouve à bout de souffle à un moment donné!).

Puis, je me suis donnée comme destination Santa Teresa, un coin historique de la ville à flanc de colline. J’ai pris le tout nouveau tram puis l’extraordinaire Metro de Rio qui est propre, facile d’accès et qui est doté de plusieurs wagons par rame qui sont exclusivement réservés aux femmes pendant certaines plages horaires. J’ai marché dans la ville pendant une bonne heure, en flânant sur l’Avenida Almirante Barroso, j’ai vu le Teatro Municipal puis enfin le quartier Santa Teresa où j’ai pu manger dans un restaurant panoramique  (et oui! extrêmement touristique, le Aprazivel) sur lequel je suis tombée un peu par hasard. . J’y ai goûté, pour la première fois de ma vie, un véritable coeur-de-palmier-pas-en-boîte-de-conserve que le serveur est venu retirer de la “branche” de palmier devant moi! Délicieux. Puis, le fantastique café brésilien. J’ai ensuite pris un taxi pour retourner à l’hôtel afin de me préparer en vue de mes meetings et de ma répétition.

Je n’ai pas vu un seul moustique, encore moins entendu parler de cas de Zika. J’ai marché seule à travers la ville (évidemment pas dans les favelas la nuit ni avec une caméra dans le cou) et les glaçons ne m’ont pas rendue malade. Les superstitieux n’apprécieront pas que j’écrive ce qui suit et me demanderont peut-être de toucher du bois par la suite, mais de tous les voyages que j’ai faits dans ma vie, y compris au Maroc, en Côte-d’Ivoire, au Ghana, en Asie, au Mexique, dans les Îles, ou partout ailleurs, la seule fois où il m’est arrivé quelque chose, c’était en plein centre-ville de Toronto, à 16h. Un jeune homme m’avait alors violemment arraché mon iPhone de mon oreille et m’avait jetée au sol lorsque je me suis retournée pour l’attraper. Voilà, au Canada, en plein jour. La seule “attaque” dont j’ai été victime. La prudence est de mise partout dans le monde, les précautions sont importantes en tout temps, mais je trouve que les médias ont fait bien mauvaise presse de Rio ces derniers temps.

Rio est une ville aux mille et une couleurs et aux mille et un mondes. Comme dans ces autres lieus que nous, Nord-Américains aimons appeler “pays émergents”, le clivage entre les riches et les pauvres est très important et la classe moyenne commence à peine à s’imposer. Oui, j’ai vu ces gens dormir un peu partout sur le trottoir, et le dessin de ces favelas colorées à flanc de montagne. Je sais que la réalité ici est difficile pour une grande partie de la population, que les inégalités persistent et que la misère, que l’on peine à deviner lorsque l’on marche au coeur des grands édifices du centre-ville de Rio, est bien présente.

Brasil estará em meu coração para sempre

Mais le Brésil est beaucoup plus que ça. Le Brésil, c’est le pays d’une multitude de musiques qui ont transcendé le temps et les frontières, c’est une Terre riche en Histoire, en architecture et en littérature, c’est un territoire immense qu’il me tarde de pouvoir un jour explorer d’un coin à l’autre afin d’y voir Manaus, Salvador, Sao Paulo, Brasilia, Florianopolis, Sao Luis, Belem et j’en passe…

Mais d’abord et avant tout, le Brésil, c’est un sourire, une mélodie, une âme, un esprit, un coeur, une chaleur, un lieu béni par la nature, un pays qui célèbre constamment, à travers son immense culture, la force de son identité.

florence

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